Salut !
Je saute dans la conversation, qui est de mon point de vue une des plus intéressantes pour comprendre les logiques et les fonctionnements respectifs de nos projets. Comme le dit très bien Olivier, il y a plusieurs manières de concevoir l’emploi dans nos projets. J’ajoute que ces conceptions me semblent résulter des objectifs poursuivis derrière la création de postes salariés : du point de vue de l’emploi (et par extension, du point de vue des rôles respectifs des bénévoles et des salariés), nos projets diffèrent fortement s’ils ont été montés par des personnes qui aspiraient à en devenir à terme salariés, ou par des personnes qui n’aspiraient pas à cela.
Il se joue ensuite des choses importantes quant au rôle des salariés dans les projets. Pour bien prendre la mesure de la question, l’existence d’une équipe salariée, avec des pouvoirs décisionnels propres et un esprit de corps, est considérée par Park Slope et par La Louve comme un facteur clé dans la réussite d’un projet de supermarché coopératif. Je cite la note sur le modèle Park Slope :
Le fonctionnement de l’équipe salariée doit donner l’exemple aux membres : coopératif, efficace et sérieux, avec une prise de conscience de la responsabilité qu’engendre la gestion d’une coopérative de ce modèle.
Ce qui conduit, en termes de tâches, à une forte autonomie sur la gestion quotidienne du magasin accordée à l’équipe salariée. Ci-dessous, les domaines de gestion explicitement réservés à l’équipe salariée - je cite encore la note sur le modèle Park Slope :
- l’emplacement des produits dans le magasin
- les fournisseurs avec lesquels la coopérative travaille
- les horaires d’ouverture
- qui embaucher ou licencier et quand
- les systèmes pour gérer la participation des membres
- les décisions liées à la mise en vente des produits
A l’éléfàn, ce n’est pas (du tout) notre conception du salariat dans un supermarché coopératif. Je pense que cela n’étonnera personne ici. Ci-dessous, je joins une petite note présentant notre philosophie de l’emploi, et la fiche de poste de notre salariée, sur laquelle nous avons beaucoup retravaillé l’année dernière (28 heures par semaine, en CDI, à 1,5 Smic)
2019.04.07 - Présentation de l’emploi à l’éléfàn.pdf (99,5 Ko)
2019.01.10 - Salariée de supermarché coopératif. Fiche de poste.pdf (61,8 Ko)
Résultat, @ali_breizhicoop, pour répondre à tes questions initiales, quelques retours de notre petite expérience qui peuvent aider à votre réflexion collective (nous avons un poste salarié depuis septembre 2017) :
- il nous paraît crucial de bien segmenter le périmètre des tâches salariées et des tâches bénévoles si on considère qu’il est normal/éthique/vital (je laisse choisir) qu’une personne salariée dans un supermarché coopératif ne fasse pas de bénévolat pour ce supermarché. Ce qui est notre cas - être un supermarché coopératif ne nous semble pas autoriser à confondre salariat et bénévolat. Évidemment, cela ne veut pas dire que nos salariés ne peuvent pas faire du bénévolat pour des projets à fort impact social ou environnemental. Mais comme il en existe tellement d’autres à côté des supermarchés coopératifs, nous ne privons de rien
- il nous paraît crucial de recruter sur les compétences plutôt que sur les services rendus ou sur l’implication préalable dans la structure. Ces compétences sont à la fois des savoirs-faire liés aux tâches, et des savoirs-être liés à la capacité à s’intégrer dans un projet constitué d’abord par des bénévoles, et dont la survie dépend fondamentalement de la participation des bénévoles (en tout cas, sous la forme d’un supermarché géré et gouverné par ses membres). La conjonction de ces deux types de compétences permet d’asseoir la légitimité de la personne salariée, et de faciliter son intégration dans la grande équipe constituée de l’ensemble des bénévoles et des salariés
Pour aller encore un peu plus loin, dans l’état actuel de nos réflexions, nous nous demandons si pour un prochain recrutement, nous ne pourrions pas imposer un recrutement en externe (ou dans une version plus light, empêcher de rester bénévole si on devient salarié). Précision utile : nous avons eu deux salariées (suite à une mobilité géographique de notre première salariée), qui n’étaient pas membres du projet avant d’être recrutées, et n’en sont pas devenues membres. Nos statuts permettent au personnel salarié de consommer dans le magasin, ce qui évite tout débat sur la nécessité de faire du bénévolat pour avoir accès aux produits.
A plus