Salut,
Pour celles et ceux qui ne savaient pas : le tribunal de commerce de Montpellier vient de refuser notre offre de reprise d’un supermarché de 850m² situé à côté de notre magasin actuel. Cela fait 3 ans qu’on cherche des locaux, on pensait avoir trouvé la perle rare. On bosse sur le projet depuis janvier, on avait levé 1 million d’€ dont 150 000 auprès de nos membres : on est dégoûtés…
Mais on a appris plein de choses dans le process. Peut être qu’on pourra aider celles et ceux qui voudraient tenter une reprise au tribunal.
La société qui gérait ce local était en redressement judiciaire et, dans ce cadre, le fond de commerce a été mis en vente.
Deux offres ont été déposées dans les délais :
- Celle de La Cagette
- Celle d’une enseigne de grande distrib dont le nom commence par C et finit par R.
Le tribunal étudie les offres en fonction de trois critères :
- la reprise des salarié.e.s
- le montant financier de l’offre (pour rembourser les créanciers et payer la procédure)
- la viabilité de l’entreprise qui subit le redressement au terme de l’opération
Nous nous sommes fait accompagner par un avocat spécialisé en procédure collective pour constituer notre dossier qui nous a coûté une bon paquet de thunes (12 000€ il me semble).
Notre offre était supérieure à l’autre sur deux des trois critères :
- le montant financier
- la viabilité de l’entreprise redressée
Mais nous ne pouvions pas reprendre de salarié.e.s, alors que l’autre offre proposait de reprendre les 10 salarié.e.s. La problématique dans ce cas de figure est que la reprise des salarié.e.s doit se faire dans les conditions identiques. Même fiche de poste, mêmes conditions salariales et même convention collective. C’était carrément impossible pour nous puisque nos salarié.e.s ne sont ni caissiers, ni agent de sécurité, ni responsables de rayon… En outre, cela aurait mis une entaille dans le fonctionnement actuel de notre équipe salarié.e.s autogérée : même niveau de responsabilité, de salaires.
Bref, on a perdu, et la conclusion c’est que pour nos modèles atypiques, la reprise de fond de commerce « à la barre » n’est probablement pas une option crédible. A moins de reprendre des salarié.e.s ou qu’il n’y ait pas d’offre concurrentes. Mais dans ce cas, c’est certainement que le local n’est pas très intéressant.
Snifff
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Merci pour le topo complet vieux frère, c’est beaucoup plus clair ! J’aimerais bien savoir si tous les TC sont aussi axés sur la sauvegarde de l’emploi… en même temps c’est super pour les salarié.es de la boîte en faillite, et en même temps c’est ultra dommage pour la jette-k… ce n’est que partie remise, la puissance politique de 5000 citoyen.nes organisé.es débouchera sans aucun doute sur l’installation dans des locaux dignes d’elleux ! On lâche rien, estival salut à tout le monde à Montpel, adiéu !
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Bonjour,
Oui il est vrai que la sauvegarde de l emploi est l un des critères, si ce n est, le critère premier sur lequel s appuie le tribunal.
Par contre, je ne sais pas si vous saviez qu il y avait une enseigne qui s était positionner, car votre avocat aurait du vous dire que ce n était pas la peine d aller plus loin et vous auriez economisé un peu sur ses honoraires…
Ce qui rend la décision du tribunal difficile à avaler c’est que le représentant des salarié.e.s de l’entreprise qui subissait le redressement judiciaire est intervenue lors de l’audience au tribunal - ce qui est écrit noir sur blanc dans le délibéré - pour dire que les salarié.e.s étaient favorables à l’offre de La Cagette plutôt qu’à celle de notre concurrent.
Le tribunal a donc privilégié la protection de l’emploi, contre l’avis des salariés qui ne voulaient pas être « repris » par carrefour. J’imagine qu’ils auraient préféré obtenir un licenciement économique que partir à Carrefour.
Le tribunal a donc favorisé :
- une offre moins disante du point de vue financier (critère N°2). Nous parlons de 100 000€ que les créanciers ne reverront pas.
- une offre moins disante du point de vue de la pérennité de l’entreprise post-reprise (critère N°3). En effet, le magasin sous la nouvelle enseigne de grande distrib sera en concurence directe avec la deuxième boutique de l’entreprise qui est situés dans le quartier. Le gérant a également exprimé sa préférence pour l’offre de La Cagette lors de l’audience et sa crainte de déposer le bilan dans les mois suivant, créant à nouveau des licenciements.
- Avec comme argument de défendre des emplois que les salarié.e.s eux même ne voulaient pas…
Bref, l’appréciation du tribunal est discutable. Un autre juge aurait pu décider l’inverse… et on ne regrette pas d’avoir essayé.
Pour répondre à @bastien_lafourmiliere, le process prévu par le tribunal dans ce type d’affaire fait qu’on ne sait pas s’il y a des offres concurrentes avant la date limite de dépôt.
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C’est bien dommage mais aussi bien instructif cette histoire. Il faudrait surveiller ce nouveau magasin dans les mois et années à venir pour vérifier qu’il n’y a pas réduction des effectifs, renégociation à la baisse des conditions de travail et de rémunération et avantages des salarié·es.
Et le cas échéant en informer les juges pour qu’iels ne recommencent pas leur erreur.
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Désolée pour vous et merci pour ces infos qui peuvent être utiles à tous ceux qui sont en recherche de locaux.
Merci pour ce résumé! On peut comprendre que la sauvegarde de l’emploi est un argument difficile à contredire! Mais bien triste pour cette chère Cagette!! Qui sait, peut-être ce n’était pas la perle rare qu’elle paraissait être et vous allez trouver encore mieux! Haut les coeurs!
D’ailleurs pour le Super Cafoutch on pensait aussi avoir trouvé le local idéal, on s’est bien accroché longtemps et on était dégoûté quand ça n’a pas marché mais in fine on est beaucoup mieux là où on est actuellement!! Et les problèmes que l’autre local a révélé peu à peu auraient peut-être eu la peau de notre projet…
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C’était celui avec le trou de l’enfer dans la cave !?
Yes! Un immeuble avec des copros qui n’ont jamais fait une réunion de copro, des infiltrations etc. etc. Merci au Saint protecteur des supermarchés coopératifs de nous avoir épargné de tomber dans ce trou
Oui, dans ce cas je comprends le dépôt d’une offre si l’information n’est révélée qu’après la date limite de dépôt.
Les tribunaux font souvent monter les enchères entre les repreneurs pour sauver le plus d’emplois, ce qui est louable, mais parfois cela n’est économiquement pas tenable longtemps (et parfois des repreneurs préfèrent lâcher l’affaire).
Le mieux est parfois d’éviter le cas de reprise d’une entreprise en cours procédure collective, car les juges n’ont pas la même appréciation que nous…et que les salariés repris.
Après le juge doit estimer que le projet sera plus tenable par un mastodonte pour rassurer de la pérennité de l’exploitation et ne regarde pas les autres aspects.
J’espère que vous aurez d’autres opportunités (peut être le même local dans quelques temps, qui sait ^^).
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